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Confusion de Peines, comment ça marche ?

Le 01 décembre 2015
Confusion de Peines, comment ça marche ?
Régime juridique et effets de la confusion de peines

Publication réalisée à l'issue de l'intervention de Me Patrick LARVOR, Avocat au Barreau de BREST, le 27 novembre 2015 dans le cadre de la formation continue des avocats.

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La confusion de peines, régie par les articles 132-2 et suivants du Code Pénal et 707 et suivants du Code de Procédure Pénale, est une notion bien plus difficile à manier qu'il n'y paraît au premier abord. Au delà des conditions de recevabilité très strictes qui supposent notamment l'absence d'une condamnation antérieure qui serait devenue définitive, l'effet de la confusion de peines (notamment en cas de peines de natures différentes)doit être correctement appréhendé.

S'agissant de la peine maximale encourue en cas d'infractions multiples, le principe légal est clair. Le cumul des peines de même nature en cas de pluralité d'infractions faisant l'objet soit d'une poursuite unique soit de poursuites distinctes mais jointes à l'audience s'effectue dans la limite de la peine la plus haute encourue (sauf amendes contraventionnelles qui peuvent se cumuler entre elles. Il existe par ailleurs des régimes particuliers pour certaines infractions, dont le délit d'évasion )

 

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En dehors de ce principe, peut se poser la question de la confusion de peine lorsque des faits ont été commis alors que d'autres faits n'ont pas fait l'objet d'une décision définitive. A défaut, s'il existe une décision antérieure devenue définitive, on parle de réitération d'infraction , voire de récidive légale, ce qui ne permet pas de solliciter une confusion de peine.

Sur la question du caractère définitif, il se distingue du caractère exécutoire qui court (hors exécution provisoire) à compter de l'expiration du délai d'appel ordinaire de 10 jours.

A la suite de la modification légale intervenue en 2009, la décision devient définitive à compter de l'expiration du délai d'appel du Parquet Général qui est fixé à 20 jours. Le cas échéant, le prévenu dispose alors d'un délai de 5 jours pour interjeter appel incident.

On précisera que les délais d'appel ordinaire (10 jours) ou d'appel du Parquet Général (20 jours) ne courent à compter du prononcé de la décision qu'en cas de décision contradictoire (ce qui est le cas lorsque le prévenu est présent lors des débats - même s'il est par la suite absent lors du prononcé de la décision - , ou encore lorsque l'avocat justifie d'un pouvoir écrit.

Ainsi, en matière de Contradictoire à Signifier (ou d'itératif défaut), la décision devient définitive...

  • 10 jours après Signification quel qu'en soit le mode

  • Si peine de prison ( en cas de signification à personne) : 10 jours

  • Si peine de prison (lorsque la signification n'est pas faite à personne) : délai de prescription de la peine

 

De même, en cas de décision rendue par défaut, la décision devient définitive à expiration de la prescription de la peine (qui ne pourra, à l'issue de ce délai, plus être mise à exécution)

 

 

Si les nouveaux faits sont commis après qu'une décision devenue définitive est intervenue pour d'autres faits, le prévenu comparaît en état de réitération d'infraction, ce qui ne permet pas de solliciter une confusion de peines.

Cette réitération peut par ailleurs s'analyser en état de récidive légale sous la double condition qu'il s'agisse d'infractions similaires ou assimilées et que les second faits aient été commis dans le délai fixé aux articles 132-8 et suivants du Code Pénal.

Sur ce point, le délai de récidive légale débute à compter du moment où la décision est devenue définitive et expire 5 ans après l'exécution de la peine (c'est à dire, selon les cas : sortie de détention, fin du délai d'épreuve, paiement de l'amende ou des jours-amende, exécution du TIG).

A toutes fins utiles, on rappellera également qu'une inscription d'une peine à l'écrou suspend le délai d'épreuve du SME et du TIG.

S'agissant du délai de récidive pour une peine de sursis, il expire 5 ans après le délai de prescription de la peine (lequel est lui-même d'une durée de 5 ans pour un délit, de sorte que le délai pendant lequel un condamné à une peine de sursis peut être en état de récidive légal pendant une durée totale de 10 ans)

 

 

 

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La possibilité de solliciter une confusion de peine suppose qu'une infraction est commise alors qu'une autre infraction commise par le même auteur n'a pas fait l'objet d'une décision définitive. Cette décision, qui ne serait pas devenue définitive, peut éventuellement avoir été prononcée par une décision étrangère.

 

Il existe des cas où la confusion s'opère de plein droit par l'effet de la Loi (Article 132-5 du Code Pénal), d'autres où elle est impossible par l'effet de la Loi (cas de la peine pour évasion qui ne peut être confondue avec la peine portée à l'écrou).

Généralement, l'opportunité de prononcer une confusion de peine (ou un rejet qui doit IMPERATIVEMENT être motivé Cass. Crim. 07 mai 2014)est laissée à l'appréciation de la juridiction du fond, au regard de 3 critères :

  • Le comportement du condamné

  • Les circonstances de l'infraction

  • Le passé pénal

 

Il n'existe pas de délai de prescription pour encadrer la recevabilité d'une demande de confusion de peines. Néanmoins, une dispense de peine ne peut être considérée ni comme une peine absorbante, ni comme une peine absorbée.

De même, on notera qu'en cas de rejet d'une demande de confusion de peine, il ne sera pas possible de présenter une requête identique par la suite en raison du principe de l'autorité de la chose jugée.


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En cas de confusion, chaque peine confondue conserve son existence propre et ses conséquences légales, s'agissant par exemple des obligations particulières d'un sursis avec mise à l'épreuve. La peine absorbée reste inscrite au B1 et peut servir de premier terme de récidive.

L’exécution de la peine la moins forte s'exécute avec ma peine la plus forte.

On observera par ailleurs qu'en cas de confusion d'une peine absorbée avec une peine absorbante comportant une mesure de sûreté, le temps de détention effectué au titre de la peine absorbée sans sûreté viendra en déduction de la peine de sûreté de la peine absorbante.

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S les effets de la confusion sont assez simple en cas de peines de même nature, il deviennent plus complexes lorsque les décisions ont prononcé des peines de natures différentes.

Il faut prendre en considération la peine la plus forte dans le quantum le plus élevé

Cas de confusion d'une peine d'emprisonnement avec sursis de X mois avec une peine d'emprisonnement de Y mois :

 

-- Si Y > X, à l'issue de l’exécution de la peine ferme, le sursis ayant été intégralement absorbée, il ne peut plus être révoqué,

-- Si X>Y, à l'issue de l'exécution de la peine ferme, une partie du sursis a été absorbé. Aussi, seule la différence entre X et Y serait susceptible de révocation.

 

Confusion entre 2 peines de Sursis avec Mise à l’Épreuve (SME)

Confusion entre deux SME : le jour où la deuxième peine est devenue exécutoire (et non pas nécessairement définitive), seule la différence entre la durée de peine encourue la plus élevée et la durée de la peine encourue la moins élevée est susceptible d'être révoquée. 

 

Confusion de 2 peines mixtes (peine ferme et peine avec sursis)

Seule doit être exécutée la partie d'emprisonnement ferme la plus longue (Crim 10 mai 2012, 11-87301

La partie de sursis conservée est celle qui était attachée à la peine absorbante.

 

Confusion entre une peine d'emprisonnement ferme, une peine mixte et une peine de sursis simple

4 mois Fermes

2 ans dont 12 mois SME

6 mois sursis

 

Partie ferme après confusion ===> 1 an (quantum d'emprisonnement ferme le plus important prononcé dans le cadre de la peine mixte, ce qui absorbe la peine de 4 mois d'emprisonnement ferme)

Sursis après confusion ===> 12 mois SME et 6 mois de sursis.

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S'agissant des sursis, ils ne pourront être révoqués que pour une durée maximale de 12 mois, qui est la durée de sursis (simple ou SME) encourue la plus importante.

- Si le SME est révoqué intégralement, la durée d'emprisonnement ferme à effectuer au titre de cette révocation sera de 12 mois. Le sursis simple, dans l'hypothèse où il serait révoqué ne pourra plus être mis à exécution.

- Si le SME est partiellement révoqué à hauteur de 8 mois, la mise à exécution de la révocation du sursis simple ne pourra dépasser 4 mois,

- Si le sursis simple est entièrement révoqué, le SME ne pourra faire l'objet que d'une révocation partielle à hauteur d'un maximum de 6 mois.

 

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Exemples :

A et B commettent des vols en réunion en date des 06 oct 2014 et 18 fév.2015

 

A est jugé contradictoirement le 05 janvier 2015 et condamné à 12 mois de détention

B est jugé le 05 janvier 2015 et condamné par jugement contradictoire à signifier à une peine de 12 mois de détention. Le Jugement lui est signifié le 1er septembre 2015.

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A est jugé contradictoirement pour les seconds faits le 07 juin 2015 en état de récidive légale (le premier jugement étant devenu définitif lors de la commission des seconds faits) et est condamné à 24 mois de détention. Il ne peut bénéficier d'une confusion de peine (en raison de la récidive légale, ou à défaut de réitération d'infraction) et doit purger une peine totale de 36 mois. Cela ne lui permettra pas au surplus de solliciter un aménagement de peine, le quantum de la peine à purger ne devant pas être supérieur à 24 mois mois, y compris pour les récidivistes depuis le 1er Janvier 2015.

B est jugé contradictoirement pour les seconds faits le 07 juin 2015 et est condamné à 24 mois de détention. La première peine n'étant pas définitive car le premier Jugement ne lui a pas été signifié au moment de la 2nde audience. Il est recevable à faire une demande de confusion de peine. En cas de confusion de peine, le quantum porté à l'écrou sera de 24 mois, ce qui lui permettra de solliciter également un aménagement de peine...qui pourra lui être accordé après appréciation souveraine de la situation par la juridiction.

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