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La Transaction Pénale

Le 09 octobre 2014
La fausse bonne idée de la Loi du 15 août 2014

La Loi du 15 août 2014 a créé une nouvelle modalité d'action pour les magistrats du Parquet... tout en écartant la présence pourtant utile de l'avocat. 

Applicable à compter du 1er octobre 2014, mais dont les décrets d'applications ne sont pas encore pris, ce mécanisme permettra de transiger sur la poursuite de certaines infractions limitativement définies.

 Parmi celles-ci, les infractions de vol pour un bien d'une valeur inférieure à un certain seuil restant à définir, les violences volontaires avec une Incapacité Temporaire Totale (ITT) pouvant aller jusqu'à 7 jours, ou encore l'usage de produits stupéfiants.

 

L'article 41-1-1 du Code de Procédure Pénale permet, sur autorisation du Procureur de la République, à un Officier de Police Judiciaire de proposer une peine à l'auteur d'une infraction pénale.

Cette peine consisterait notamment en l'obligation de réparer le dommage résultant de l'infraction poursuivie, en fixant le délai accordé pour procéder à cette réparation, ou la consignation d'une somme pouvant aller jusqu'à un tiers de l'amende encourue.

En cas d'acceptation de cette transaction par la personne mise en cause, l'accord conclu avec l'Officier de Police Judiciaire est homologué par le Président du Tribunal de Grande Instance qui PEUT entendre l'auteur de l'infraction, qui lui-même POURRAIT être assisté à cette occasion par son avocat.

Sous réserve d'une bonne exécution des obligations mises à la charge de la personne mise en cause, cette transaction permettrait l'extinction de l'action publique.

Présenté ainsi, cette « Transaction Pénale » paraît être un moyen efficace de sanctionner rapidement les auteurs d'infractions sans engorger les Tribunaux.

A y regarder de plus près, ce texte ne protège pas les droits du justiciable, qu'il soit mis en cause ou victime.

En effet, pour la personne mise en cause, cette proposition de transaction est faite dans un Commissariat ou une Brigade de Gendarmerie ; dans des conditions qui ne permettent pas de réfléchir sereinement à cette offre... d'autant plus que cette offre émane d'un Officier de Police Judiciaire.

Comment savoir si cette transaction pénale s'effectue dans le respect de la procédure et que son contenu constitue une opportunité, si elle n'est pas au préalable soumise à l'appréciation d'un avocat ? Car l'intervention de l'avocat, contrairement à la procédure Comparution sur Reconnaissance Préalable de Culpabilité (CRPC) n'est pas obligatoire...

Il existe donc le risque de déléguer pour bon nombre d'infraction le monopole de la peine à des Officiers de Police Judiciaire, et ce d'une manière déconnectée de tout contrôle réel. Il est en effet plus que probable que le Procureur de la République vienne à prendre des directives permanentes au profit de Fonctionnaires de Police ou de Gendarmes pour la mise en place à grande échelle de cette transaction pénale.

Si les risques sont importants pour le mise en cause, ils ne le sont pas moins pour le plaignant. L'exemple le plus évident reste celui des violences volontaires. Qui devra « valoriser » le dommage subi par la victime de violences ? Ni l'enquêteur, ni le plaignant, ni l'intervention éventuelle d'un médecin ne sont formé à l'évaluation financière du dommage corporel. Seul un avocat est en mesure de faire cette évaluation dans le cadre de cette « transaction pénale », … mais ce n'est pas prévu par la Loi.

On imagine déjà les difficultés que pourra rencontrer la victime. Même en cas de dommage avec une ITT inférieure à 7 jours, les conséquences financières peuvent être extrêmement lourdes, notamment en cas de dommage de type dentaire ou de traumatisme psychologique.

En choisissant d'écarter l'avocat de la « transaction pénale », l’État a choisi de penser à ses finances bien avant de prendre en compte les besoins des justiciables et la nécessaire préservation de leurs droits, qu'ils soient mis en cause ou victimes.