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Peines minimales : Etude critique de l'efficacité de la prison sur la délinquance

Le 27 mars 2021
Peines minimales : Etude critique de l'efficacité de la prison sur la délinquance
Xavier BERTRAND a fait la promesse de peines minimales à l'occasion de sa déclaration de candidature à l'élection présidentielle. Coup médiatique plutôt que criminologique. Analyse chiffrée de la situation.

Annonçant sa candidature à l'élection présidentielle, Xavier BERTRAND a indiqué qu'il promettait d'instaurer des peines minimales automatiques. Cette annonce, pour le moins étonnante, est l'occasion de réaliser un petit focus sur l'intérêt de la peine, notamment correctionnelle.


Le postulat selon lequel l'importance de la sanction pénale serait un moyen efficace de limiter la commission d'infractions semble une évidence. Pourtant, elle ne correspond à aucune réalité, au regard de l'échec de la Loi sur les peines plancher du 10 août 2007.


Abrogée en 2014 par la loi n° 2014-896 du 15 août 2014 relative à l'individualisation des peines et renforçant l'efficacité des sanctions pénales, le dispositif des peines plancher a marqué de façon significative le recours à la peine d'emprisonnement.


La Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme avait mis en avant une augmentation de la durée de la peine d'emprisonnement pour des faits commis en état de récidive légale en raison de cette législation, le quantum moyen étant passé de 8,2 mois à 11 mois.


En revanche, il n'a pas eu d'incidences sur la commission de nouvelles infractions par le condamné, le nombre de réitérants étant de 199.642 en 2007 contre 216.247 en 2010.


Sur la période 2004 – 2016 Infostat 156 de décembre 2017, le volume de condamnations pour délit est globalement stable autour de 500.000 condamnations la part de l'emprisonnement avec sursis total tend à se réduire pour passer sur cette période de 43% à 28 %. La proportion de condamnations à un peine d'emprisonnement ferme augmente comparativement de 16% à 20 %, pour un total de 130.000 peines en 2016.

Autre donnée d'importance, la durée moyenne de l'augmentation encourue est passée de 4 ans à 4 ans et 9 mois, une évolution que l'on peut mettre en perspective avec la hausse du quantum moyen de la peine prononcée qui est passé de 7 mois en 2004 à 8 mois en 2016.


L'instauration d'une peine minimale n'a eu d'incidences que sur le nombre et la durée des peines d'emprisonnement. Aucune sur la commission d'infraction, même commise en état de réitération.


Plus encore, l'instauration d'une peine minimale repose sur l'idée que l'emprisonnement serait nécessaire car elle serait plus efficace que toute autre peine à limiter la réitération, parce qu'il s'agit de la peine la plus sévère. Une fois encore, si l'idée est séduisante, il ne s'agit que d'une idée reçue.


En effet, le taux moyen de commission d'une nouvelle infraction dans les 5 années qui suivent une « sortie sèche » de détention s'établit à hauteur de 63%. En revanche, ce même taux est mesuré à hauteur 55% pour les détenus ayant bénéficié d'un aménagement avec maintien d'écrou (Source Ministère de la Justice, Projet de Loi de prévention de la récidive et d'individualisation de la peine, chiffres-clés mai 2014). Ce taux tombe à 30% en cas de libération conditionnelle.

La détention apparaît comme la solution moins efficace pour lutter contre la réitération.


Lutter efficacement contre la délinquance n'impose pas de durcir les peines peines encourues, ni même de créer des sanctions minimales. Les études statistiques démontrent clairement que cela est contre productif.


Hélas, si ce postulat est inexact, il reste intuitif. Au point qu'il est légitime de se demander si l'objectif de telles propositions visent un effet criminologique... ou électoral.

Il ne s'agit bien évidemment pas de remettre en cause le principe ou l'utilisé de l'emprisonnement, mais de réfléchir a des solutions différentes, novatrices et moins couteuses.


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